Page:Lassalle - Discours et pamphlets.djvu/167

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faits qui renferment en eux un nouvel état de choses qui doit nécessairement en sortir, faits que l’on ne remarque nullement si l’on se borne à les considérer superficiellement ; les autorités mêmes, tandis qu’elles poursuivent des agitateurs peu dangereux, non seulement passent avec candeur devant ces événements, mais en font les soutiens nécessaires de notre civilisation, les célèbrent comme s’ils en étaient les fleurs, les points culminants, et tiennent à l’occasion, en leur honneur, des discours solennels qui les reconnaissent et les saluent.

Après tous ces développements, Messieurs, vous comprendrez parfaitement la vraie signification de la célèbre brochure qu’en 1788, un an avant la Révolution française, l’abbé Sieyès publia et qui se résume en ces mots : « Qu’est-ce que le Tiers-État ? Rien ! Que doit-il être ? Tout ! »

La bourgeoisie en France était, en effet, désignée sous le nom de Tiers-État, parce que dans les États généraux de ce pays elle formait, vis-à-vis des deux états privilégiés, la noblesse et le clergé, le troisième état, par lequel on entendait l’ensemble de la nation non privilégiée.

Cette brochure se résume donc dans les deux questions posées par Sieyès et dans les deux réponses qu’il donne : « Qu’est-ce que le Tiers-État ? Rien. Que doit-il être ? Tout ! ».

C’est ainsi que Sieyès formule ces deux questions et ces deux réponses. Mais leur importance véritable eût été plus exactement et plus profondément exprimée de la façon suivante : cela résulte d’ailleurs de tout ce qui précède.