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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE


réalisera, quelque belle que soit la poésie, si i la musique est vraiment inspirée, dionysiaque. Mais dans ce cas un auditeur réellement capable d’enthousiasme musical ne veut pas entendre les paroles, ni s’en représenter le sens ; l’élan dithyrambique de son âme en serait brisé. Ce que Nietzsche a dit à ce propos de la Neuvième symphonie, il le répète d’« une messe de Palestrina, d’une cantate de Bach, d’un oratorio de Hændel[1] ». Le texte, ajoutet-il, n’existe que pour les chanteurs. Pour l’auditeur, c’est de la musique simplement, et cela précisément parce que c’est de la grande musique. L’opéra a commencé avec le besoin qu’a éprouvé un public, chez qui la prédominance de l’esprit rationaliste avait éteint la faculté d’enthousiasme dionysiaque, de percevoir avant tout le sens des paroles[2]. Cette prétention rabaissait la musique au rang d’art d’imitation, elle

  1. T. IX, p. 324.
  2. Ibid. Cf. Naissance de la tragédie, § 19.