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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE


cer lui-même ; et ce qu’on pourrait peut-être aujourd’hui comprendre rétrospectivement comme des présages, apparaît d’abord comme une juxtaposition d’aptitudes plus propre à inspirer de l’inquiétude que des espérances : un esprit d’agitation, d’irritabilité, une hâte nerveuse à se saisir de mille choses, un plaisir passionné à des états d’âme surexaltés, presque maladifs, des sautes brusques d’une paix toute pleine d’âme à des dispositions violentes et tumultueuses. Le foyer paternel ne lui offrait aucune tradition, aucune discipline d’art : la peinture, la poésie, l’art du comédien le sollicitaient tout autant que l’éducation et la carrière du savant ; celui qui l’observait superficiellement pouvait le croire né pour le dilettantisme[1].


Nietzsche, même au temps de la Naissance de la Tragédie, contestait (in petto) à Wagner la « naïveté », entendons la naïveté d’un Raphaël, d’un Corrège, d’un Mozart, que les riches spectacles de la vie enchantent par eux-mêmes, non pas en vertu de tel rapport moral, philosophique ou religieux, et dont les conceptions n’obéissent absolument à d’autre attrait, à d’autre cause finale, pourrait-on dire, que le

  1. Richard Wagner in Bayreuth, p. 502.