Page:Latocnaye - Promenade d un francais en suede et en norvege, 1e part, 1801.djvu/150

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Bientôt la même inquiétude et le même ennui qui ont fait quitter la maison, y font revenir en hâte. On balbutie quelques mots estropiés de la langue des différens peuples, et les voisins vous regardent comme un prodige.

Plein de la course qu’on vient de faire, on écrit son journal, jour par jour, heure par heure, mille par mille ; comment on eut des draps sales ici, comment les chemins étaient cahoteux, comment les chevaux étaient fatigués, et beaucoup d’autres choses presqu’aussi admirables. On copie en outre le bavardage des gens qui ont passé devant, les listes des concierges, l’almanach royal et le livre de poste. On joint à tout ce fatras, quelques apostrophes sentimentales, comme quoi on s’est attendri, et on a pensé à sa fille en voyant un veau faire des cabrioles, comme quoi le chant mélodieux du coucou a fait venir des idées délicieuses et songer à sa fidèle épouse. Comme quoi la lune dansait à travers les arbres, et que les sylphes, les gnômes et les commis de la douane. — Mais mon Dieu ! me voilà comme ces messieurs, je ne sais plus ce que je dis. Tant y a que l’on se fait imprimer pour se désennuyer, sans faire la réflexion salutaire, que cette récréation innocente pourrait fort bien produire un effet tout-à-fait différent, sur le lecteur tant béné-