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et ne peuvent exercer aucune fonction tant que dure le deuil légal.

Nulle vertu, en Corée, n’est estimée et honorée autant que la piété filiale ; nulle n’est enseignée avec plus de soin, nulle n’est plus magnifiquement récompensée, par des exemptions d’impôts, par l’érection de colonnes monumentales, ou même de temples, par des dignités et des emplois publics ; aussi les exemples extraordinaires de cette vertu sont-ils assez fréquents, surtout de la part d’un fils ou d’une fille envers son père. Ils se rencontrent plus rarement de la part des enfants envers leur mère, et cela à cause des préjugés d’éducation dont nous avons parlé.

L’adoption des enfants est très commune en Corée. Celui qui n’a pas de fils nés de lui, doit en choisir dans sa parenté, et la grande raison de cet usage se trouve dans les croyances religieuses du pays. En effet, ce sont les descendants qui doivent rendre aux ancêtres le culte habituel, garder leurs tablettes, observer les nombreuses cérémonies des funérailles et du deuil, offrir les sacrifices, etc. La conservation de la famille n’est qu’une fin secondaire de l’adoption ; aussi n’adopte-t-on jamais de filles, parce qu’elles ne peuvent accomplir les rites prescrits. D’un autre côté, le consentement de l’adopté ou de ses parents n’est nullement nécessaire, parce qu’il s’agit d’une nécessité religieuse et sociale, dont le gouvernement, en cas de besoin, impose de force l’acceptation.

En Corée, comme dans la plupart des pays d’Orient, les liens de famille sont beaucoup plus resserrés et s’étendent beaucoup plus loin que chez les peuples européens de notre époque.

Tous les parents jusqu’au quinzième ou vingtième degré, quelle que soit d’ailleurs leur position sociale, qu’ils soient riches ou pauvres, savants ou ignorants, fonctionnaires publics ou mendiants, forment un clan, une tribu et, pour parler plus juste, une seule famille, dont tous les membres ont des intérêts communs et doivent se soutenir réciproquement.

À la mort du père, le fils aîné prend sa place ; il conserve la propriété. Les cadets reçoivent de leurs parents des donations plus ou moins importantes à l’époque de leur mariage et dans