Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

certaines autres circonstances, selon l’usage, le rang et la fortune des familles ; mais tous les biens restent à l’aîné, qui est tenu de prendre soin de ses frères comme de ses propres enfants. Ses frères, de leur côté, le regardent comme leur père, et, quand il est condamné à la prison ou à l’exil, lui rendent les mêmes services qu’à leur propre père. En général, les rapports entre parents sont d’une grande cordialité. La maison de l’un est la maison de tous, les ressources de l’un sont à peu près celles de tous, et tous appuient celui d’entre eux qui a quelque chance d’obtenir un emploi ou de gagner de l’argent, parce que tous en profiteront.

C’est là l’usage universel, et la loi le reconnaît, car on fait payer aux plus proches parents non-seulement les impôts et contributions qu’un des leurs ne paye pas, mais même les dettes particulières qu’il ne peut pas ou ne veut pas acquitter. Les tribunaux prononcent toujours dans ce sens, et il ne vient à l’esprit de personne de s’en plaindre ou de protester.

« Dernièrement, écrivait en 1855 Mgr Daveluy, un jeune homme de plus de vingt ans fut traduit devant un mandarin pour quelques francs de cote personnelle dus au fisc, et qu’il se trouvait dans l’impossibilité de payer. Le magistrat, prévenu d’avance, arrangea l’affaire d’une manière qui fut fort applaudie.

« — Pourquoi n’acquittes-tu pas tes contributions ? » demanda-t-il au jeune homme.

« — Je vis difficilement de mes journées de travail, et je n’ai aucune ressource.

« — Où demeures-tu ?

« — Dans la rue.

« — Et tes parents ?

« — Je les ai perdus dès mon enfance.

« — Ne reste-t-il personne de ta famille ?

« — J’ai un oncle qui demeure dans telle rue, et vit d’un petit fonds de terre qu’il possède.

« — Ne vient-il pas à ton aide ?

« — Quelquefois ; mais il a lui-même ses charges, et ne peut faire que bien peu pour moi. »

« Le mandarin sachant que le jeune homme parlait ainsi par