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Au commandement de leur chef, les soldats commencèrent une série d’évolutions autour du martyr, tout en déchargeant leurs sabres sur son cou. Il était quatre heures de l’après-midi, le 31 mai 1801. Le P. Jacques n’avait que trente-deux ans.

Dieu sembla, au moment même de sa mort, manifester sa colère. Le ciel, jusque-là pur et serein, se couvrit subitement de sombres nuages pendant les longs préparatifs de l’exécution. Un horrible ouragan éclata, et la violence du vent, les éclairs sillonnant les ténèbres devenues très épaisses jetèrent l’effroi dans le cœur des témoins de cette scène. L’âme du saint martyr s’était à peine envolée que la tempête cessait, et le soleil, jusque-là voilé, reprit presque subitement son éclat.

Quelques jours après, les chrétiens réussirent à s’emparer des restes vénérés du P. Tsiou et les enterrèrent secrètement. D’après les relations coréennes, des guérisons extraordinaires eurent lieu par son intercession, et la mémoire du saint prêtre est restée gravée dans les traditions populaires, bien que le lieu de sa sépulture soit maintenant ignoré.

Dieu, dans sa miséricorde, n’avait fait que montrer cette vive lumière à l’Église de Corée, et les effets en furent merveilleux. Le P. Tsiou demeura six ans dans la Corée, et, malgré les circonstances qui paralysèrent son zèle, le nombre des chrétiens de quatre mille s’éleva à dix mille. Ses vertus apostoliques et ses rares talents l’avaient rendu cher à tous les chrétiens, que sa mort plongea de nouveau dans l’abandon.

Quelques explications furent, paraît-il, demandées par la cour de Pékin au roi de Corée, par rapport à cette exécution. Pour s’excuser, le roi envoya une lettre avec une certaine somme d’argent, qui eut le don de calmer la colère de l’empereur et de le convaincre que l’origine chinoise du P. Tsiou n’avait été connue qu’après sa mort, par les dépositions tardives d’autres coupables.