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Ceux qui connaissaient les caractères chinois écrivaient leur confession ; ceux qui ne les connaissaient pas, la faisaient écrite par d’autres ou priaient le prêtre de vouloir bien leur permettre de se confesser par interprète. À la vue de cet empressement, Maubant composa une formule d’examen de conscience en chinois, la traduisit en coréen et l’apprit par cœur.

Dès lors il fut moins que jamais maître de ses moments.

« Ce matin, écrivait-il le samedi saint, deux mois après son arrivée, nos chrétiens étaient au comble de la joie. Ils n’avaient jamais vu célébrer l’office du samedi saint. Ils ont vu un seul prêtre le célébrer. Qu’auraient-ils dit s’ils avaient vu un office pontifical ? La cérémonie a duré depuis cinq heures jusqu’à midi environ, je dis environ, car nous n’avons ni montre, ni horloge, ni aucune espèce de cadran. J’ai baptisé sept adultes. Le plus grand obstacle à la beauté de la cérémonie, après le défaut d’officiants, venait de l’appartement même. Nous avions ajusté une croix au bout d’un roseau, mais on ne pouvait élever au-dessus de sa tête, ni la croix, ni le cierge pascal, ni le roseau. Ordinairement, on ne peut entrer dans les appartements des Coréens sans se courber : un homme de cinq pieds et quelques pouces n’est pas à l’aise. »

Du secours lui arriva bientôt, c’était M. Jacques Chastan[1], ancien professeur au séminaire général de Pulo-Pinang, que la mission de Corée avait séduit, comme elle avait séduit Bruguière et Maubant.

Il se mit en route dès 1834. Arrivé dans un des ports du Kiang-nan, il s’embarqua avec trois chrétiens du Fokien, sur une barque de pêcheurs, et fit voile à travers le golfe du Tché-ly, vers les rivages de la Tartarie.

Quand il descendit à terre, deux de ses guides, effrayés à la vue de cette contrée inconnue et presque déserte, refusèrent de marcher plus en avant. Ils voulaient même entraîner M. Chastan avec eux ; celui-ci tint ferme, les paya, et s’en alla à la découverte avec un seul fokinois qui lui resta fidèle. Après un mois de courses

  1. Du diocèse de Digne.