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sujets, si par la suite une pareille tyrannie s’exerce de la part des Coréens sur quelques-uns d’entre eux, certainement la Corée ne pourra éviter d’éprouver de grands désastres ; et quand ces désastres viendront fondre sur le roi, sur les ministres et les mandarins, qu’ils se gardent bien de les imputer à d’autres qu’à eux-mêmes ; ils seront punis, et cela pour s’être montrés cruels, injustes, inhumains.

« L’an 1846 du salut du monde, le 8 de la cinquième lune (1er juin). »

« Si l’on vient, écrit à l’occasion de cette lettre Mgr Ferréol, si l’on vient l’année prochaine, et qu’on exige la réparation de la mort de nos confrères, il nous est permis d’espérer une ère moins cruelle pour la religion ; mais si l’on s’en tient à des menaces, le peuple coréen méprisera les Français, et le roi n’en deviendra que plus furieux contre les chrétiens. Déjà cette lettre a été l’occasion de la mort du P. Kim, ou du moins l’a accélérée. »

En effet, voyant les chrétiens soutenus par les étrangers, le roi avait donné l’ordre de frapper les prisonniers, de relâcher ceux qui apostasieraient, et de mettre immédiatement à mort ceux qui resteraient fidèles à leur foi.

André Kim garda son invincible fermeté ; il fut décapité le 16 septembre 1846. Sa mort fut belle et sainte, elle fait honneur au clergé indigène, qui dans toutes les missions récompensait si largement la société des Missions étrangères des sacrifices qu’elle s’impose pour lui.

Pendant les préparatifs du supplice, André parlait avec ses bourreaux :

« De cette manière, suis-je placé comme il faut ? leur disait-il. Pouvez-vous frapper à votre aise ?

— Non, tournez-vous un peu, voilà qui est bien.

— Frappez, je suis prêt. »

Alors commença autour du martyr une sorte de danse guerrière, exécutée par une douzaine de soldats, qui, le sabre au poing, déchargeaient leur arme en passant sur le cou de leur victime. La tête ne tomba qu’au huitième coup de sabre.

Le Père André avait à peine vingt-cinq ans. Ses travaux, son