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du supplice. Chacun des martyrs était assis sur une chaise longue, la tête légèrement renversée en arrière et retenue par les cheveux ; les bras étendus et liés solidement, incapables d’aucun mouvement, ils étaient portés sur les épaules de deux hommes. Au-dessus de la tête de chacun était écrite la sentence de mort prononcée par le roi.

La foule grossissait à mesure que le cortège s’avançait ; chacun voulait considérer de près les grands criminels d’Occident. Personne ne leur épargnait les insultes, tandis que les martyrs conservaient leur calme au milieu de ces clameurs de la populace et priaient pour leurs bourreaux.

« Ne riez pas, ne vous moquez pas de nous, criait de temps en temps Mgr Berneux à ceux qui l’entouraient ; c’est plutôt votre propre malheur que vous devriez pleurer. Nous étions venus pour vous procurer le bonheur éternel. Après notre mort, qui donc vous montrera le chemin du ciel ! »

Puis il s’entretenait encore avec ses jeunes confrères, les exhortait et poussait avec eux de profonds soupirs en voyant cette foule en délire.

« Hélas ! mon Dieu, disait-il, qu’ils sont à plaindre ! »

Après avoir quitté l’enceinte de Séoul, les soldats se dirigèrent vers la rive du fleuve, à une certaine distance de la ville. Une grande plaine de sable qui s’étendait en plan incliné jusqu’au fleuve permettait à la multitude de jouir du cruel spectacle de l’exécution des martyrs. Arrivés à cet endroit, les soldats se rangèrent en un vaste demi-cercle en face de la tente du mandarin. Un grand mât était planté au centre, et un drapeau blanc flottait à son extrémité.

Après avoir déposé à terre leurs victimes et les avoir détachées de la chaise sur laquelle elles étaient portées, les bourreaux les dépouillèrent de leurs vêtements, à l’exception d’un simple caleçon.

Mgr Berneux fut appelé le premier. Aussitôt ses bras sont liés fortement derrière le dos, de façon à lui ôter toute possibilité de les remuer. Un bourreau replie les deux extrémités de chaque oreille et les traverse ainsi chacune du fer d’une flèche, qu’il laisse suspendre de haut en bas dans la plaie. Un autre lui jette de