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Un de ses chefs paraît avoir eu autrefois des relations avec les chrétiens ; il raconte dans un de ses livres comment, en 1864, alors qu’il était anxieux de savoir s’il devait ou non embrasser le catholicisme, il eut un songe : un esprit lui apparut qui, tout en louant son désir de parvenir à la vérité, lui dit de laisser de côté la religion du Maître du ciel telle qu’elle est enseignée par les hommes venus de l’Occident, promettant de l’en instruire lui-même ; la doctrine qu’il recevrait et qu’il serait chargé de répandre porterait le nom de Tong-hak.

S’il y a là autre chose que les rêveries d’un illuminé, il est bien évident que l’ange qui a parlé au prophète n’est point un ange de lumière.

Au nom de Dieu (Htyen-tjyou) et à quelques lambeaux de vérités empruntés au catholicisme, sont mêlées les idées les plus incompréhensibles, tirées généralement du livre des Mutations (I-King), et des formules de magie et quelques fragments de prières. D’ailleurs, le très grand nombre des partisans du Tong-hak ignorent absolument la doctrine qu’ils sont censés professer ; son nom seul leur est un signe de ralliement.

En décembre 1892, plusieurs milliers de ces nouveaux sectaires s’assemblèrent dans la province du Sud. Leur programme avéré était de monter en masse à Séoul et d’en chasser tous les étrangers ; mais très certainement les meneurs avaient un autre but. Pendant tout l’hiver, il ne fut bruit que de leur rassemblement ; nombreux furent les badauds qui abandonnèrent leur métier et la culture de leurs champs, croyant qu’après le grand coup frappé on pourrait vivre sans travailler. Dans les campagnes, la crainte était vive, surtout chez nos chrétiens, et à chaque instant il arrivait à l’évêque des courriers pour lui dire de prendre garde ; que cette fois sa perte et celle de la mission était certaine. Habitués aux exagérations des Coréens, les missionnaires ne prêtèrent qu’une médiocre attention à tous ces dires.

« Le 25 mars, jour que l’on disait fixé pour le massacre général, se passa sans la moindre alerte. Un peu plus tard, l’époque ordinaire des examens amena nombre d’étrangers à Séoul : on disait