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quatre quatre baptêmes d’adultes, chiffre que nous n’avions jamais atteint.

Cependant les sectaires reparurent bientôt, et les troubles furent plus grands, surtout quand les Japonais, désireux de s’emparer de la Corée, eurent déclaré la guerre à la Chine.

Le Céleste Empire envoya des troupes qui, très indisciplinées et mal commandées, portèrent le désordre à son comble. À la haine des Japonais les soldats chinois ajoutaient la haine des Européens et particulièrement des missionnaires ; aussi un des plus jeunes apôtres de la Corée, le Père Jozeau, tomba bientôt sous leurs coups.

Depuis quelque temps il était le plus menacé ; à plusieurs reprises les rebelles envahirent sa résidence, et trois fois même ils le couchèrent en joue ; chaque fois le Père s’était avancé, découvrant sa poitrine et leur disant de tirer s’ils l’osaient. Sa bonne contenance seule les avait fait reculer. Toutefois cette situation violente ne pouvait durer, et le Père Jozeau ne se faisait point illusion ; car, le 16 juillet, il écrivait en tête de son testament :

« Au milieu des désordres où je me trouve, je m’attends d’un jour à l’autre à succomber sous les coups de quelques sauvages. Peut-être mon sang serait-il nécessaire pour empêcher le massacre de mes chrétiens ; s’il en est ainsi, je le donne de tout mon cœur pour la plus grande gloire de Dieu. »

Le 11 juillet, Mgr Mutel recevait à Séoul la dépêche suivante :

« Les Pères et tous les chrétiens vont mourir. »

Il renouvela aussitôt par télégramme l’ordre déjà donné par lettre pour le cas où la situation deviendrait désespérée :

« Que les Pères fuient ou viennent ici. »

Dès qu’il eut connaissance de ce nouvel ordre, le Père Jozeau partit pour la ville de Tjyen-Tjyou, dont il était éloigné de cinquante lys environ, et de là il se mit en route pour Séoul. Les Pères Baudounet et Villemot, serrés de moins près, résolurent d’attendre encore. Le Père Jozeau partit le 27, à cheval, accompagné d’un domestique. Quatre autres chrétiens le suivaient à pied ; mais ils furent bientôt devancés de trente ou quarante lys par le missionnaire, qui avait résolu de gagner Séoul en quatre