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— Que faites-vous dans le Tjyen-la-to ?

— Je ne me suis jamais mêlé de rien que d’enseigner la doctrine chrétienne.

— Pourquoi donc avez-vous quitté le Tjyen-la-to ?

— J’ai dû partir à cause des Tong-hak, qui nous menaçaient de mort, moi et les chrétiens.

— N’avez-vous point vu des Japonais ?

— Non.

— Où allez-vous ?

— À Séoul.

— Puisque vous allez à Séoul, retournons ensemble à Kong-tjyou ; de là nous ferons route de concert pour Séoul. »

Le Père Jozeau vit bien sans doute qu’on lui tendait un piège ; mais, dans l’impossibilité de résister, il se laissa conduire où l’on voulut. Une escouade de soldats le mit entre ses rangs et le fit marcher à pied en le gardant de près ; de temps en temps ces soldats poussaient des cris sauvages. Après avoir ainsi cheminé quelque temps, le missionnaire, fatigué de la marche et de la chaleur très vive, fit signe à son domestique, qui conduisait son cheval par la bride, d’approcher des rangs ; mais on ne voulut pas permettre au Père de monter à cheval, et il dut bon gré mal gré continuer son chemin de croix.

Avant d’arriver au fleuve de Kong-tjyou, il y a sur le bord de la route, à une auberge appelée Kam-na-mou-Kol, un petit pavillon ouvert, entretenu par l’administration de la ville et servant de salle d’attente pour les hôtes de distinction qui y arrivent. C’est là que les mandarins sortant de charge ont coutume d’échanger la politesse d’usage avec ceux qui viennent les remplacer. Le gouvernement de Kong-tjyou, apprenant l’arrivée des troupes chinoises, envoya à l’encontre du général le mandarin et le juge criminel, tous deux magistrats de la ville. La rencontre se fit précisément dans ce pavillon.

Après les premières politesses échangées, le général chinois entra dans le pavillon et s’y assit ; à sa droite et à sa gauche s’assirent également le mandarin titulaire et le juge criminel. Le Père Jozeau, harassé de fatigue, s’arrêta comme tout le monde