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de blessés chez les rebelles et dans la population. Priez Dieu de nous secourir, nous et nos chrétiens.

« Adieu, monsieur le curé. Tout à vous in Christo.

« M. Jozeau, Missionnaire apostolique en Corée. »


Cette lettre est arrivée en France le 29 août. Ce jour même, seize jeunes prêtres quittaient le séminaire des Missions étrangères, et parmi eux deux étaient destinés pour la mission de Corée.

Un des partants a traduit par un chant la joie sainte et les désirs ardents qui, de tous temps, animèrent les aspirants missionnaires à la nouvelle de la mort sanglante de leurs anciens dans la carrière apostolique.


Un de tes fils est mort ! Chante, ô noble Vendée[1] !
Il est tombé là-bas aux champs de la Corée,
Fauché dans son printemps par le glaive chinois.
À son Alleluia nous mêlons notre voix :
Car ce n’est pas des pleurs qu’on étonne à ces apôtres,
On ne sait que chanter au martyre des nôtres,
Et l’œil est fier de voir briller sur le drapeau,
Avec Cornay, Vénard, ce nouveau nom : Jozeau !
Depuis longtemps déjà les courriers de l’Asie
N’apportaient au pays que des bruits d’accalmie.
On bénissait le ciel…, mais on rêvait tout bas,
Près des cangues des preux, à leur heureux trépas ;
Et c’est par un soupir qu’en montrant leurs reliques,
On commençait ainsi : « C’était aux temps antique… »
Bref, l’espoir s’éteignait comme un feu qui s’endort.
… Voilà qu’il se ranime au seul bruit de ta mort,
Jozeau ; car ton martyre est un phare d’espoir.
Nous qui partons demain sous l’étoile des mages,
Nous saluons joyeux l’horizon plein d’orages.


Sentiments admirables d’âmes saintes heureuses de donner leur sang pour la gloire du Christ Jésus ; et pourtant, ô mon Dieu, notre dernière et notre plus ardente prière n’est pas pour demander la grâce du martyre, mais la paix, la liberté, qui rendent plus facile et plus rapide le triomphe de votre nom. Mon Dieu, daignez nous exaucer !

  1. Le Père Jozeau était Vendéen, né à La Boissière-Thouarsaise (Deux-Sèvres), le 9 février 1866, missionnaire en Corée en 1888.