Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/37

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leur jeunesse, dont on adore tous les caprices, à qui personne n’ose donner un avis, qu’une étiquette ridicule enferme dans leur palais, au milieu d’un sérail, dès l’âge de douze ou quinze ans ! D’ailleurs, en Corée, comme en d’autres pays dans des circonstances analogues, il se rencontre presque toujours des ministres ambitieux qui spéculent sur les passions du maître, et cherchent à l’énerver par l’abus des plaisirs, afin qu’il ne puisse se mêler des affaires du gouvernement, et les laisse régner eux-mêmes sous son nom.

Il est donc rare que le roi soit capable d’administrer par lui-même et de surveiller les ministres et les grands dignitaires. Quand il le fait, le peuple y gagne ; car alors les mandarins sont obligés d’être sur leurs gardes et de remplir leur devoir avec plus d’attention. Des émissaires secrets rapportent au roi les cas d’oppression, de concussion, de déni de justice, et les coupables sont punis, au moment où ils s’y attendent le moins, par la disgrâce ou par l’exil. Aussi la masse du peuple, généralement attachée au roi, ne l’accuse pas des actes de tyrannie et d’oppression dont elle a à souffrir. Toute la responsabilité en retombe sur les mandarins.

L’aristocratie étant très puissante en Corée, il semble au premier abord que les princes du sang, les frères, oncles ou neveux des rois, doivent jouir d’un grand pouvoir. C’est tout l’opposé. Le despotisme est, par essence, soupçonneux et jaloux de toute influence étrangère, et jamais les princes ne sont appelés à remplir aucune fonction importante, ni à se mêler des affaires. S’ils ne se tiennent pas rigoureusement à l’écart, ils s’exposent à être accusés, sous le plus frivole prétexte, de tentative de rébellion, et ces accusations trouvent facilement crédit. Il arrive très fréquemment que ces princes sont condamnés à mort par suite d’intrigues de cour, même quand ils vivent dans la retraite et le silence. Dans les soixante dernières années, quoique la famille royale compte très peu de membres, trois princes ont été ainsi exécutés.

Au reste, la puissance royale, quoique toujours suprême en théorie, est maintenant, en fait, bien diminuée. Les grandes