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champ, et la trouva délicieuse. Le lendemain, le moun-kaik était nommé mandarin. »

Outre les nobles de naissance, dont nous avons parlé jusqu’à présent, il y a des nobles d’adoption. Ce sont des individus riches qui achètent à prix d’argent des titres de noblesse, non pas au roi ni aux ministres, mais à quelque puissante famille. Ils obtiennent ainsi d’être inscrits sur les registres généalogiques comme descendants de tel ou tel, et dès lors tous les membres de cette famille les reconnaissent comme parents devant le gouvernement et le public, les soutiennent et les protègent comme tels en toute circonstance. Cette pratique est contraire au texte de la loi ; mais elle a de nos jours passé dans les mœurs, et les ministres et le roi lui-même sont obligés de la tolérer.

Inutile d’ajouter qu’en Corée, comme ailleurs, les usurpations de titres de noblesse ne sont pas rares. Beaucoup d’aventuriers, quand ils se trouvent dans une province éloignée de la leur, se font passer pour nobles, prennent le bonnet de crin, et usent et abusent de tous les autres privilèges de caste, avec une insolence tout à fait aristocratique. Quand la fraude est découverte, on les traîne à la préfecture la plus voisine, et ils reçoivent une forte bastonnade ; mais s’ils ont des talents, de l’adresse, de l’argent surtout, les mandarins ferment les yeux, et le peuple est obligé de les supporter. Souvent, pendant les persécutions, des chrétiens ont employé ce moyen pour se mettre à l’abri des molestations, et, s’en trouvant bien, persistent à se faire passer pour nobles.

Entre la noblesse et le peuple proprement dit se trouve la classe moyenne, qui n’existe réellement qu’à la capitale. Elle se compose des familles qui, depuis plusieurs générations, remplissent auprès du gouvernement certaines fonctions spéciales, telles que celles d’interprètes, d’astronomes, de médecins, etc.

Au-dessous de la classe moyenne vient le peuple, qui n’a absolument aucune influence politique. Légalement un homme du peuple peut concourir aux examens publics pour les emplois civils et militaires ; mais en fait, quelque titre qu’il obtienne, même de licencié ou de docteur, il ne recevra jamais du gouvernement que des fonctions insignifiantes. Pour se défendre contre