Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/115

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s'abattit. Tous étaient songeurs maintenant; aucune lueur de révolte ne brillait dans les yeux, et les dos courbés semblaient ployer sous le poids.

L'heure du départ approchait pour la plupart d'entre eux. Ils se levèrent tristes et, dans les rues qu'empourprait le soleil couchant, ils se séparèrent avec des au revoir mélancoliques. La poignée de main qu'ils donnèrent tour à tour à Coste lui prouva que ses plaintes avaient éveillé un écho, qu'il avait parmi eux des amis.

XVII

Le printemps, qui avait si bien commencé et, en dépit de quelques journées de vent soufflant du nord-ouest, avait égayé de glorieux matins et d'après-midi ensoleillées et tièdes le mois de mars et hâté l'essor des confiantes verdures, se prit tout à coup à bouder. De gros nuages noirs fuyaient dans le ciel et crevaient sur le village et les champs en giboulées froides. Le temps se rafraîchit tout d'un coup ; on aurait dit d'un retour vers l'hiver. Les dos, vêtus déjà d'étoffes plus légères, se courbèrent frileux sous les averses cinglantes et les jeunes feuillées frissonnèrent sous les rafales du tarral.

Caussette se mit à tousser dans les premiers jours d'avril. Elle frissonnait même au coin du feu, lorsqu'elle se décidait à quitter sa chambre glaciale. Ses plaintes s'éternisèrent ; plus acariâtre de jour en jour, elle bougonnait sans cesse contre le temps et contre les enfants. Louise, très irritable de son côté, se fâcha à la longue; la mésintelligence des deux femmes s'accrut, s'affirma. Coup sur coup, des scènes violen-