Aller au contenu

Page:LeMay - Contes vrais, 1907.djvu/512

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
474
FONTAINE VS. BOISVERT

Madame Fontaine sortit tout à coup de sa chambre. Elle parut plus longue et plus sèche que de coutume.

— Bonjour, Joseph, fit-elle, d’une voix qui coupait les paroles comme une lame d’acier coupe les muscles, et sans beaucoup regarder le jeune homme. As-tu déjà fini ta journée, toi ? Tu as bien de la chance. Le soleil est encore haut… Ce n’est pas tout le monde qui « dételle » de si bonne heure.

Puis, se tournant vers Angélique :

— Ton rouet est-il brisé ? Tu ne fileras pas ton aune aujourd’hui. Angélique rougit, reprit le brin de laine oublié entre les doigts du voisin et, pesant d’un pied un peu dépité sur la marche du rouet, elle rendit au fuseau son mouvement rapide et son monotone grondement.

Alors Joseph Boisvert se leva. Il dit qu’il allait rencontrer monsieur Fontaine à la grange. Il valait autant le voir là. D’ailleurs, la présence de madame Fontaine gâtait beaucoup le plaisir.