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l’affaire sougraine

Pendant que nous étions au lac Mégantic, mon père est venu avec un autre homme pour me chercher. Il a donné la main à tout le monde, à Sougraine comme aux autres. Il lui a demandé s’il avait objection à me laisser partir, et l’accusé a répondu que non. Lorsque mon père m’a demandé de retourner chez nous, j’ai refusé en disant que j’avais honte, que je serais montrée du doigt comme une chienne…

Il y eut un mouvement de surprise… Le mot sonnait mal. On la regardait avec curiosité.

Madame D’Aucheron paraissait horriblement souffrir. Son regard avait quelque chose de vague et de hagard qui faisait mal ; sa parole, tantôt vive et saccadée, tantôt hésitante et embarrassée décelait un grand trouble intérieur. Il lui venait des rougeurs de honte sur les joues et aussitôt après, des pâleurs d’effroi.

Le substitut du Procureur lui demanda si le prisonnier ne lui avait jamais dit comment était morte sa femme.

Elle se leva vivement :

— Oui, monsieur, répondit-elle, et sa voix était vibrante, il m’a dit que cela lui ayant fait de la peine de l’avoir quittée seule sur la grève, il