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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

orphelins ! et une larme vint luire au coin de sa paupière ridée. C’était une bonne vieille que la mère Lozet. On la voyait accourir partout où il y avait une douleur à consoler. Elle était plus empressée à partager les peines que les plaisirs. Elle disait : Ceux qui sont heureux n’ont pas besoin de moi : ils ont toujours assez d’amis ; mais souvent les malheureux sont seuls.

Ce fut la femme de Louis Gagnon qui lui apprit cette nouvelle, un jour qu’elle la rencontra près du cénellier, à la fourche des chemins de St. Jean Baptiste et de St. Eustache. À la remarque de la bonne vieille elle répondit : Je les plains moi aussi. J’ai entendu déjà le petit garçon pleurer plus d’une fois.

— Et la petite fille, reprit la mère Lozet, comment va-t-elle être élevée ?… Ce garçon-là (Elle parlait d’Eusèbe) ne va jamais à confesse, je crois : ça ne prie peut-être pas même le bon Dieu matin et soir !

Les deux femmes ne prêtaient pas au tuteur plus de malice ou de défauts qu’il n’en avait. Vieux garçon de trente six ans, il était devenu misanthrope à force de rester seul. Les