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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

Il n’avait pas perdu, non plus, le souvenir de sa mère, et gardait fidèlement, malgré sa malice et son étourderie, la promesse qu’il lui avait faite de dire, chaque jour, un Ave, Maria. C’était bien la seule prière qu’il récitât avant de se mettre au lit. Enfin, il se fatigua de la vie de gamin et il voulut voir du pays. Il partit, avec une troupe d’hommes de chantier qui montaient dans l’Ottawa. Il s’engagea d’abord pour faire, la cuisine. C’est généralement par là que l’on commence. Il passa tout un hiver en tête-à-tête avec la marmite et les chaudrons. Le printemps, il avait merveilleusement pris des forces et du développement. Une autre année, il battit les chemins, puis il s’arma de la hache et frappa dur. Il acquit du prestige dans les camps de l’Ottawa comme sur les quais de la ville ; sur les quais, parce qu’il avait été filou, gouailleur et querelleur, dans les camps, parce qu’il était fort, jurait et buvait comme deux.

Un jour, c’était à la fin de septembre, il entre à l’auberge de l’Oiseau de Proie. On ne le reconnaît point, car il n’est pas venu boire dans ce bouchon depuis plusieurs années. Il reconnaît bien, lui, la plupart de ceux qui se