Page:LeMay - Le pèlerin de Sainte-Anne, Tome II, 1877.djvu/19

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— Geneviève ! Geneviève ! s’écrient les jeunes travailleurs.

Asselin sent un frisson courir dans ses veines ; il ne dit rien, et se retire au fond de la braierie, près de l’échafaud. Geneviève, pâle, décharnée, les yeux secs et vitreux, les lèvres serrées, regarde tout le monde, et tous les regards sont fixés sur elle. La première elle rompt le silence :

— Est-elle ici ? L’avez-vous vue ? dit-elle… Je la cherche depuis trois jours !

— Qui ? demande Picounoc.

Geneviève jette au facétieux garçon un regard effrayant.

— Qui ? Qui ? Tu le sais bien ! Tout le monde le sait. Au Château-Richer tout le monde pleure, à Québec tout le monde rit, parce que les méchants sont venus de la ville.

— On ne te comprend plus, Geneviève ! dit madame Eusèbe en s’avançant vers la malheureuse fille : es-tu troublée ?

L’infortunée ramasse une petite pierre et la jette dans le ruisseau en disant :

— L’eau était calme, maintenant elle est agitée ; elle était pure, maintenant elle est vaseuse.