Page:LeMay - Le pèlerin de Sainte-Anne, Tome II, 1877.djvu/77

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Aussitôt dit, aussitôt fait. Un fanal est allumé et plusieurs habitants descendent sur la rive.

— Allons vers le quai d’en haut ; les voix paraissaient venir de là.

Celui qui disait ces paroles prend le devant, et les autres le suivent. La chandelle de suif qui brûle dans le fanal de ferblanc rond et percé à jour comme une broderie, n’éclaire guère le rivage sombre, et le mythologiste qui aurait vu passer, dans la nuit, ces ombres silencieuses guidées par une pâle et tremblante lumière, se serait cru transporté sur les bords du Styx, à l’heure Charon guide à sa barque les âmes de ceux qui ne sont plus. La mer commençait à monter : on entendait au large, par moments, quelques avirons attardés. Des rues voisines montait encore un bruit de pas de moins en moins assourdissant. Soudain un cri s’élève et les ombres dispersées se réunissent autour du fanal qui paraît jeter un plus vif rayon. On voit les hommes se pencher ; on les entend murmurer. Puis ils reviennent au bateau, marchant ensemble à pas lents comme chargés d’un pesant fardeau. Ils avaient trouvé le malheureux Pagé, sans connaissance et couvert de sang et de boue,