Page:LeMay - Le pèlerin de Sainte-Anne, Tome II, 1877.djvu/81

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victime au fleuve. Les blessures de Pagé furent trouvées graves, dangereuses, mais aucune n’était nécessairement mortelle. Au premier coup d’œil, la tête paraissait n’être qu’une masse informe, hideuse et sanglante. Mais le fil d’argent rapprocha les lèvres béantes des plaies ; l’eau tiède nettoya la chevelure souillée et la face bleuie, et les emplâtres dissimulèrent le crâne chauve. L’inflammation du cerveau était à craindre. Les médecins s’efforcèrent de la prévenir. Ils passèrent toute la nuit au chevet du blessé.

La nouvelle de cet événement se propagea vite dans les campagnes. Elle fit sensation à Lotbinière et au Cap-Santé. Asselin l’apprit en revenant du moulin à farine, avec une pesante moulée (mouture). Ce fut Pierre Fanfan qui la lui raconta. Tout le reste de la route, le tuteur infidèle resta plongé dans une profonde inquiétude. Il songeait que le muet, s’il était innocent et mis en liberté, n’aurait guère de peine ensuite, grâce à la sympathie générale, à se faire reconnaître pour son pupille et l’enfant de Letellier. Mais il cherchait en vain quels pouvaient être les voleurs, et le récit de Noémie Bélanger lui revenait à la