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SONNETS ÉVANGÉLIQUES



LE BAISER DE JUDAS

Une lune sanglante au ciel noir s’allumait.
Les oliviers, berçant une étrange harmonie,
Paraissaient sangloter. Puis, comme une ironie,
Des voix chantaient au loin, tout près l’amour dormait.

Jésus pleurait du sang ; mais le ciel se fermait,
Laissant se consommer la grande félonie.
— Loin de moi ce calice !… Oh ! l’horrible agonie !
Le Dieu courbait la tête et l’homme s’abîmait.

Dans l’ombre des rameaux l’Iscariote approche.
Il embrasse son Maître. Insensible au reproche,
Il saura le livrer comme il a su l’offrir.

Et maintenant il fuit dans la clarté douteuse…
Il fallait ce baiser d’une bouche menteuse,
Pour que l’amour comprît ce qu’il devrait souffrir.