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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/144

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LA PLUS BELLE

de Vincent Le Tellier, malade sympathique, intelligent, résigné. Il lui semblait parler de Jean et cette fausse confidence soulageait si bien son cœur que Claire s’écria :

— Mais tu l’aimes, petite malheureuse !

— Ah ! non, par exemple.

Monique, prosaïque, ajouta tout de suite :

— Tu n’y penses pas, un infirme.

Onse heures sonnaient. Lucette se leva brusquement, comme Cendrillon au bal, à minuit. La lumière jaune illumina un instant les quatre jeunes têtes, fit reluire les cheveux blonds ou bruns, danser des lueurs dans les yeux gris, bleus, noirs. Elles riaient et leurs dents saines brillaient.

Elles allaient partir, quand Monique poussa, sans raison, un grand soupir et déclara :

— Tout de même, mes amies, les années passent et rien n’arrive. Quand nous étions petites, nous n’avions qu’à nous amuser, à jouer et à rire ; c’était toujours en attendant. Mais à vingt ans, cette attente devait finir. Eh bien non ! rien ne change au fond, les années passent et rien n’arrive et ce sentiment d’attente dure toujours…

— Il durera toujours, pontifia Nicole. N’as-tu pas lu l’Imitation ? Nous ne serons jamais rassasiés. Pour finir d’attendre, il faudrait être rassasiés, satisfaits.