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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/208

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TÊTES ET FIGURES

diantes s’approcher de la voiture ? Je voudrais bien savoir pourquoi l’on vous paie. Vous avez vraiment une conduite honteuse pour la maison.

— Mademoiselle, répliqua gravement le valet de pied, je regrette beaucoup ce qui arrive, mais je ne fais que de voir cette femme-là.

Sur ce, il referma la portière, puis se tournant d’un air solennel du côté de la mendiante qui était restée sur le trottoir :

— Vous avez entendu, dit-il, en faisant de la main un geste impérieux, eh bien ! veuillez filer !…

Cet ordre exécuté, le valet monta sur l’impériale, prit place auprès du cocher, se croisa les bras, et l’équipage partit grand train ; la lumière des fanaux du brougham se perdit bientôt dans les tourbillons de brume.

Seule sur le trottoir, la pauvre abandonnée qui venait de se faire refuser l’aumône et impitoyablement chasser par des gens qui ne connaissent pas ce que c’est que la charité ou ne l’exercent qu’à grands sons de trompe, leva les yeux au ciel d’un air de désespoir. On eût dit un moment qu’elle allait lancer une imprécation contre la Providence, lorsque tout-à-coup un