Aller au contenu

Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
TÊTES ET FIGURES

Derechef, elle se mit à contempler la statue de marbre sur l’autel. Pour elle, ça n’avait aucun sens. Elle n’avait jamais entendu parler de religion chrétienne, excepté par une brochure dont le titre très encourageant était : « Arrêtez ! vous allez en enfer ! »

Dans le milieu où le sort l’avait condamnée à vivre, on faisait fi de toute religion ; le nom du Christ servait de juron ordinaire, par conséquent l’image douce, souriante, affectueusement invitante de la Vierge et de l’Enfant-Jésus dans le temple, n’avait pu rien dire à son imagination.

— Comme si je pouvais prier, marmotta-t-elle de nouveau, d’un ton sardonique.

Elle examina attentivement la pièce d’argent qu’on lui avait donnée, puis le bébé qui dormait toujours profondément dans ses bras.

Soudain, cédant à une impulsion irrésistible, elle tomba à genoux.

— Qui que vous soyez, murmura-t-elle en s’adressant à la statue de marbre, il semble que vous avez aussi un enfant. Peut-être pouvez-vous m’aider à avoir soin de celui-ci. Il n’est pas à moi ; je voudrais bien tout de même qu’il le fût. Quoi qu’il en soit, il m’est bien plus cher qu’il ne l’est à sa mère. Je pense bien que vous n’écoutez pas les gens de mon espèce, mais si je pouvais trouver le bon Dieu quelque part par ici, je lui demanderais bien de bénir cette brave