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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/237

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TÊTES ET FIGURES

Tout en essayant de calmer de la sorte ses terreurs intimes, elle entourait la petite créature de plus de soins que jamais, en s’imaginant qu’elle pouvait, à elle seule, la ranimer. Néanmoins l’enfant parut de moins en moins se soucier de soins et de caresses ; il ne faisait que prendre machinalement et, parfois, avec une répugnance passive, la nourriture qu’on lui offrait.

Et le grand sablier du Temps continua de fonctionner, lentement, il est vrai, mais, aussi, sans trêve ni merci.

On était à la veille du jour de l’an.

Lise avait erré de rue en rue, toute la journée, égrenant toujours son petit répertoire de vieilles ballades, en dépit de la neige et d’un vent glacial, glacial au point que bien des gens, au cœur sensible et se dévouant d’ailleurs à toutes les charités, avaient dû fermer portes et fenêtres ; la voix de Lise n’était pas même arrivée jusqu’à eux. Le passage de la vieille à la nouvelle année, avait donc été pour elle lugubre, désolant ; c’est à peine si elle avait pu ramasser six pennies. Comment pouvait-elle reparaître devant la mère Mawks, affronter la mégère avec aussi maigre recette ? Haletante, harassée qu’elle était, comme la nuit, du gris était passée au noir opaque, elle quitta machinalement le Strand pour se diriger du côté de la chaussée. À quelque distance de