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Page:LeVasseur - Têtes et figures, 1920.djvu/66

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TÊTES ET FIGURES

Quant à l’étranger, il s’était rarement assis à une table avec un appétit plus féroce. Il n’est pas de meilleur apéritif qu’une course de quelques lieues en carriole. Il s’empressa d’ajouter au menu une petite bouteille de rhum qui mit tout le monde en bonne humeur.


Tout en donnant un vigoureux coup de dent à la tourtière, l’étranger, qui se sentait pour de bon ranimé, causait avec entrain, lorsque tout à coup ses yeux tombèrent sur un violon accroché à la muraille.

— Madame, hasarda-t-il, on fait de la musique ici : vous avez quelqu’un qui joue du violon ?

— Pardon, mon cher Monsieur, répliqua la mère Adrien, y a personne qui joue du violon ici. Ce violon appartenait à mon défunt mari.

Depuis qu’il est mort, il est toujours resté accroché là, et je l’ai tenu aussi en ordre que possible, en souvenir de ce pauvre défunt… Il y a ben des années de ça. Ce pauvre Adrien était un homme de plaisir, allez ! Il n’y avait pas de fête sans lui. Depuis ce temps-là, j’ai ben entendu des joueurs en renommée, mais, vrai comme je vous l’dis, j’en ai pas trouvé qui jouaient à mon goût comme mon pauvre homme.