Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/273

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moins d’accord avec eux en assurant que l’enseignement détaillé de l’histoire, comme on le trouve exposé dans les livres classiques, n’est propre qu’à fausser le jugement de l’élève et pervertir un peu sa moralité. Les faits historiques représentant presque toujours le triomphe de la ruse, de la violence et de la force, ne paraissent pas très aptes à former l’esprit des enfants. Pour peu d’ailleurs que ces derniers parcourent quelques œuvres d’historiens — et ils le feront tôt ou tard — ils s’apercevront bien vite que les mêmes faits sont présentés et jugés de la façon la plus opposée par des auteurs différents. Cette constatation, qu’ils étendront naturellement à ce qu’on leur enseigne, affaiblira leur confiance dans l’autorité des professeurs.

Il y aurait cependant beaucoup à tirer de l’enseignement de l’histoire pour la formation de l’intelligence de la jeunesse, si cet enseignement était donné dans un tout autre esprit que celui qui règne chez nos universitaires.

Au lieu des généalogies de souverains et des récits de bataille, il faudrait montrer à l’élève ce que chaque peuple a laissé derrière lui, c’est-à-dire expliquer l’histoire de sa civilisation. Elle s’éclaire surtout par l’étude des monuments et des diverses œuvres d’art. Si ces œuvres sont mises sous les yeux de l’élève par des photographies, des projections, des visites dans les musées, il est intéressé et retient toujours ce qu’il a vu, alors qu’il ne retient pas ce qu’il a appris par cœur[1].

  1. Comme exemple des documents que peuvent fournir à l’histoire les œuvres d’art et les monuments, je renvoie le lecteur à mon Histoire des Civilisations de l’Orient, 3 vol. in-4o avec 1200 gravures, exécutées la plupart d’après des photographies recueillies dans mes voyages.