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concours d’agrégation étant surtout des concours d’ergotage. Les candidats ont appris à ergoter et ne peuvent guère enseigner autre chose à leurs élèves. Le monde marche. La concurrence des autres peuples nous menace. Pendant ce temps, les professeurs ergotent. Tels les Byzantins, alors que Mahomet les assiégeait. Les Barbares étaient dans leurs murs. Ils ergotaient encore.

En faisant, comme on le fait aujourd’hui dans tous les collèges, ergoter sur des idées, couper des cheveux en quatre, discuter des idées subtiles, on va exactement contre la destination elle-même de l’enseignement[1].

Dans un article publié par la Revue de Paris, M. Lavisse donne une excellente idée de la valeur de nos méthodes universitaires par les réponses des élèves à l’examen d’entrée de Saint-Cyr. On y voit avec quel soin les professeurs s’attachent aux petits faits isolés, aux détails faciles à emmagasiner dans la mémoire et leur impuissance à enseigner des idées générales sur les institutions, les mœurs, les coutumes d’une époque.

Un candidat interrogé sur Condé, un autre sur Luxembourg, ne savent ni l’un ni l’autre la vie, le caractère, la méthode de ces deux hommes de guerre, mais la réponse est toute prête pour la question : « Qui commandait l’avant-garde au passage du Rhin ? » Et pas un nom ne manque dans l’énumération des batailles de Condé et de Luxembourg.

M. Lavisse a fort bien résumé, dans les lignes suivantes, les méthodes d’enseignement de l’Université.

Petits livres appris par cœur, salis par des doigts ennuyés ; mots incompris encombrant les mémoires distraites ; opinions d’autrui, absorbées sans être même assimilées, sur des chefs-

  1. Enquête, t. I, p. 171. Doumic, professeur à Stanislas.