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aux maîtres de l’Université à interpréter au gré des idées du jour les faits historiques du passé. Quelques-uns poussent la crainte jusqu’à ne plus oser prononcer le nom de Dieu dans leurs manuels, n’hésitant pas pour y réussir à défigurer même les fables de La Fontaine ! Chacun connaît l’histoire du petit poisson  :

Petit poisson deviendra grand

Pourvu que Dieu lui prête vie.

Les auteurs des nouveaux manuels écrivent gravement :

Petit poisson deviendra grand

Pourvu qu’on lui prête la vie.

Voici à quelles platitudes on arrive pour flatter des chefs de bureaux et obtenir des souscriptions !


* *

Le livre dans lequel j’ai exposé les principes psychologiques qui devraient être la base de l’éducation eut beaucoup de lecteurs, à en juger par ses nombreuses éditions. Néanmoins, son influence sur les universitaires est restée très faible. Confinés dans de rigoureux programmes, les professeurs ne peuvent enseigner que les matières de ces programmes, et les enseignent nécessairement avec les méthodes qui servirent à leur propre instruction.

Cependant, nos recherches ont fini par trouver un écho dans la très importante école destinée à former nos futurs généraux. Je veux parler de l’École de guerre, soustraite entièrement, comme on le sait, à l’influence de l’Université. De savants maîtres, le général Bonnal, hier, le colonel de Maud’huy aujourd’hui et quelques autres y inculquent à une brillante élite d’officiers les principes fondamentaux développés dans la Psychologie de l’éducation. Parmi les plus importants se trouve celui que j’ai choisi comme épigraphe : L’éducation est l’art de faire passer le conscient dans l’inconscient. Ainsi que je l’ai déjà dit dans un autre chapitre, monsieur le commandant Gaucher a publié sous ce titre Étude sur la Psychologie de la Troupe et du Commandement, un livre destiné aux officiers, et basé sur les méthodes d’éducation que j’ai fait connaître. Ce succès, un peu inespéré, prouve qu’il ne faut jamais hésiter à dire ce qu’on doit dire même quand on est seul à le dire.[1]

  1. Je dois reconnaître que si les idées exposées dans mon livre ont eu peu de succès en France, elles en ont obtenu beaucoup à l’étranger. Le grand-duc Constantin Constantinovich, président de l’Académie des sciences et grand-maître des Écoles militaires de Russie, l’a fait traduire en russe pour l’enseignement dans les écoles qu’il dirige.