Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/315

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ment sur elle-même et apprendre à s’organiser pour se défendre comme le fit la Suède dans sa lutte contre l’insurrection de la classe ouvrière.

Instruit par l’expérience, le gouvernement suédois comprit que le droit de grève, tel qu’il est pratiqué aujourd’hui, accordant à une minorité de factieux le droit d’arrêter tous les services publics d’un pays et semer partout le désordre, était complètement incompatible avec les progrès de la civilisation. Il déposa devant le Parlement un projet de loi réglant les contrats collectifs et prononçant des pénalités sévères contre les grèves de nature à entraîner un danger public. Un tribunal spécial d’arbitrage réglera les différends. Avec une telle loi nous n’eussions connu, ni la grève des postiers, ni les grèves répétées des inscrits maritimes qui achèvent de ruiner notre marine marchande.

Un mouvement analogue commence à se dessiner en France devant les dures leçons de l’expérience. Mais notre mentalité devra subir quelques changements, avant qu’il aboutisse à des lois. On trouvera d’intéressants développements sur ce sujet dans le livre de monsieur Bouloc : Le Droit de grève. Il montre clairement les illusions psychologiques et économiques d’un tel droit. J’engage l’auteur à se répéter souvent, s’il veut intéresser à sa cause d’influents orateurs.

Notre bourgeoisie est encore trop indécise et trop molle pour songer à se protéger, mais l’énergie de l’attaque amènera peut-être celle de la défense.

Monsieur Georges Sorel le montre fort bien : "Le jour, dit-il, où les patrons s’apercevront qu’ils n’ont rien à gagner par les œuvres de paix sociale ou par la démocratie, ils comprendront qu’ils ont été mal conseillés, alors il y a quelque chance pour qu’ils retrouvent leur ancienne énergie. Une classe ouvrière grandissante et solidement organisée peut forcer la classe capitaliste à demeurer ardente dans la lutte industrielle."

Qui veut mériter de vivre doit rester le plus fort. Avec l’évolution moderne du monde, nul ne pourra conserver ce qu’il ne saura défendre. Pour triompher dans les luttes que nous voyons grandir, notre bourgeoisie devra acquérir certaines vertus et renoncer à certains vices. L’insolence du luxe de quelques parvenus oisifs, luxe que l’ouvrier croit composé d’une partie considérable de son travail, a susci-