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même lui laisser le temps de grandir.

Sous un prétexte quelconque une nouvelle grève fut décrétée. À moins d’admettre que la France serait à l’avenir gouvernée par une délégation de commis des postes il fallait bien se défendre. On se défendit et, dès le premier choc la bulle de savon s’évanouit.

Son anéantissement amena l’effondrement instantané d’autres fantômes, notamment celui de la grève générale que les ministres redoutaient fort, l’un d’eux l’ayant inventée avant d’arriver au pouvoir.

Vainqueurs et vaincus témoignèrent du reste d’une complète ignorance dans l’art de manier les fantômes. Elle leur fit entasser des fautes de psychologie sans excuse.

Faute énorme de psychologie du gouvernement d’avoir cédé une première fois. Faute des postiers, touchant à l’imbécillité pure lorsque, après avoir, contre toute vraisemblance, réussi à dompter l’État, ils ne comprirent pas que de telles victoires ne sauraient se répéter et qu’une défaite devient alors irrémédiable. Faute plus grossière encore celle des membres de la C.G.T. qui, au lieu de se borner à agiter le spectre de la grève générale, voulurent s’en servir et dévoilèrent du même coup la grandeur de son impuissance. Les occultistes auraient dû leur révéler que les fantômes, puissants dans l’ombre, s’évanouissent à la lumière. Certaines vérités n’ont pas le droit d’être ignorées.

Le très piteux échec de la grève des postiers et de la grève générale, solennellement décrétée par la Confédération Générale du Travail, qui avait fini par se croire un petit comité de salut public, n’a pas eu pour seul résultat de nous apprendre l’utilité de la résistance. Cette assez honteuse histoire montre encore avec quelle facilité grandissent les petits fantômes dès qu’ils sentent qu’on a peur d’eux.

L’évolution du langage des postiers est fort typique à ce point de vue et fourmille d’enseignements, que devront méditer nos hommes d’État. Au début de la première grève ils étaient respectueux encore. La capitulation du gouvernement leur ayant donné l’illusion d’une force invincible, leur langage se transforme aussitôt. Devenus soudain anti-patriotes et révolutionnaires, ils s’allient à la Confédération Générale du Travail dont le but avoué est la destruc-