Page:Le Braz - La légende de la mort chez les Bretons vol 1 1902.djvu/223

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ils gagnèrent le logis. Ils ne couchaient pas dans la maison. Pour être plus à portée de soigner les bêtes, tous trois avaient leurs lits dans la crèche aux chevaux'. Comme ils avaient veillé assez tard et qu'ils avaient en plus la fatigue d'une journée de travail, ils ne furent pas longs à s'endormir. Mais, au plus profond de leur premier somme, ils furent réveillés en sursaut. On heurtait avec bruit à l'huis de l'étable.

— Qu'est-ce qu'il y a ? demandèrent-ils en sautant à bas de leurs couchettes.

Celui qui frappait se contenta de heurter à nouveau, sans répondre.

Alors, l'aîné des Guissouarn courut à la porte et l'ouvrit toute grande : il ne vit que la nuit claire, n'entendit que la grosse haleine du vent. Il essaya de refermer la porte, mais ne put. Les forces de ses frères réunies aux siennes ne purent pas davantage. Alors, ils furent saisis du tremblement de la peur et dirent d'un ton suppliant :

— Au nom de Dieu, parlez ! Qui êtes-vous et qu'estce qu'il vous faut?

. Rien ne se montra, mais une voix sourde se fit entendre, qui disait :

— Qui je suis, vous l'apprendrez à vos dépens si, tout à l'heure, l'arbre que vous avez mis en travers de la route n'est pas rangé contre le talus. Voilà ce qu'il me faut. Venez.

Ils allèrent tels qu'ils étaient, c'est-à-dire à moitié

i. On appelle crèche, en Basse-Bretagne, l'étable ou l'écurie.