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Page:Le Braz - Vieilles histoires du pays breton, 1905.djvu/138

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AUX VEILLÉES DE NOËL

mage et berger. Tous sont tout entiers à leur rôle d’annonciateur du Messie, Ils y apportent une conviction ingénue et entêtée. Pluie ou verglas, ils n’en ont cure. J’en ai vu stationner devant les maisons, fronts découverts et toujours bramant, sous des averses torrentielles. Parmi eux, beaucoup ne sont pas éloignés de croire que le Christ est venu spécialement pour les Bretons. Aussi le poème de sa naissance a-t-il pris, en passant par leurs lèvres, une forte teinte celtique. Il suffirait de coudre ensemble, à la façon des rhapsodes, quelques-uns des « noëls » locaux où cette naissance est célébrée, pour obtenir un évangile complet, j’entends un évangile bas-breton, de la Nativité. C’est ce que l’on a tenté de faire dans les lignes qui suivent, en demeurant fidèle non seulement à l’esprit, mais, autant que possible, à la lettre de ces naïves inspirations.

Or, c’était à Beth-Léhem, la petite ville de Judée, à deux lieues de Jérusalem la sainte. Le soir descendait, doux et pur, quoiqu’on fût au cœur de l’hiver. Depuis de longues heures déjà le marché était fini ; et cependant les rues étaient pleines de monde, et sans cesse la foule s’accroissait. Car l’empereur de Rome, désireux d’être fixé sur le nombre de ses sujets, avait ordonné à tous les habitants de la contrée de se faire inscrire au greffe. de leur quartier. Eet tous étaient venus, rois, princes, bourgeois et simples artisans. L’hôte de la grande hôtellerie de Beth-Léhem, debout sur le seuil de sa porte, et regardant passer les flots de la multitude, disait à sa femme empressée autour des fourneaux :

— On prétend qu’il a déjà défilé dans les salles du