Page:Le Corset de Toilette.djvu/9

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ses qualités, a si généralement adopté le corset[1], il y tient à tel point, qu’il ne reste plus raisonnablement aujourd’hui qu’à le prémunir contre les erreurs, les abus, les dangers d’un usage définitivement entré dans les mœurs après bien des fortunes diverses.

Faut-il déplorer ce que certains sont bien prêts de qualifier de sot engouement, de coquetterie coupable, de faiblesse dangereuse ? Si l’on veut bien nous suivre jusqu’au bout de ce court opuscule, on sera vite persuadé du contraire.

Avec la diversité des toilettes, des ajustements de parures dont la coupe et les formes artistiques s’harmonisent et s’idéalisent chaque jour, avec le sens de la correction, de la distinction, de la dignité même de la tenue, qui guide chez les femmes de goût délicat, supérieur, les rectifications souvent nécessaires à imposer aux exagérations, aux écarts de la mode[2], on s’explique aisément le rôle considérable que tient le corset baleiné au point de vue esthétique, quelques reproches justifiés qu’on lui ait adressés jusqu’ici.

En pratique, le corset répond à une impérieuse nécessité : l’attachement, la suspension des dessous, indispensables à un juste, à un sérieux idéal de la grâce correcte dans les divers arrangements du corsage, dans l’ordre d’un habillement soigné. Il faut convenir toutefois que tel qu’on le retrouve à peu près partout encore, tel qu’on le confectionne et l’ajuste, le corset de toilette soulève toujours de trop légitimes objections, de trop justes critiques, et pour ses nombreuses imperfections plastiques et en raison des dangers physiologiques qu’il recèle.

Guidées par des conseils autorisés puisés dans la science, soucieuses du développement normal et de la tenue rationnelle de leurs jeunes filles, ainsi que de leur santé propre et de la distinction de leur tournure, il est temps que les femmes, les mères de famille, songent à y regarder de très près avant de livrer leur taille et leurs organes aux étreintes incommodes, déformatrices et toujours

  1. On raconte que lors de l’abolition de l’esclavage au Brésil, la joie fut grande chez les affranchies : elles pouvaient enfin porter un corset, usage interdit jusque-là aux esclaves. La consommation fut telle que corsetières et commissionnaires en marchandises eurent toutes les peines du monde à satisfaire la nouvelle et impatiente clientèle.
  2. À tel point qu’un auteur a pu dire que le vêtement féminin ne connaissait d’autre loi qu’une inconstance perpétuelle et indomptable.