Page:Le Dantec — L'Athéisme.djvu/218

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d’une manière vicieuse. Les états de conscience sont la traduction, dans le langage subjectif propre à celui qui en est le siège, des modifications mesurables que l’observateur étranger étudierait au moyen du phrénographe hypothétique de tout à l’heure. L’observateur étranger, lisant au phrénographe, ne lirait pas : « douleur des coups de bâton », « amour maternel » ; il verrait seulement des hiéroglyphes mesurables conduisant à d’autres hiéroglyphes qui représenteraient, dans le premier cas, la mise en train d’un mouvement de fuite, dans le second cas, la mise en train d’un mouvement de défense, et tout cela lui paraîtrait soumis au déterminisme le plus parfait, sans qu’il eût aucun moyen de savoir si l’animal étudié est au courant, d’une manière ou d’une autre, de ce qui se passe en lui. La conscience de ces mouvements cérébraux chez l’animal observé serait aussi inconnue de l’observateur au phrénographe, que la sonorité des vibrations l’est du sourd qui fait de l’acoustique. Mais si l’on apprend au sourd que des hommes plus privilégiés peuvent lire directement, au moyen de leurs oreilles, le mouvement vibratoire qu’il lit indirectement au moyen de ses yeux, il n’aura jamais l’idée de prétendre que la ligne sinueuse du cylindre enregistreur « est mécaniquement, mathématiquement déterminée, quels que soient les sons correspondants qu’entendent les hommes pourvus d’oreilles ».