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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

— Maintenant, vous allez vous sécher, dit-elle, et comme l’eau clapotait dans ses sabots, elle lui fît signe de les enlever, et de poser ses pieds sur un tabouret.

Il obéissait, engourdi de tiède atmosphère, repu de fatigue, baigné d’obscur contentement, le corps droit cependant dans le fauteuil au haut dossier.

Bientôt, il laissa aller sa tête sur son épaule, et s’endormit. Elle ôta le bol de ses genoux sans qu’il s’en aperçut, puis recula jusqu’à la table, se pencha sur les feuillets, reprit la plume. Ce fut en vain. Son regard retournait à l’homme endormi. Il ne lui faisait pas peur, et pourtant, avec quel souci elle s’enfermait le soir venu dans la maison de pierre !

La lande était amicale. L’âme du Nord fuyait dans ses forêts blanches. La statue de glace se désagrégeait. Ses traits devenaient fluides. Ils se noyaient dans une expression de défaite. La mer avait un souffle régulier et humain qui se répercutait dans la conque de la maisonnette. Tout était douceur et confiance. Dans la chemi­née profonde, il ne restait plus qu’une bûche consumée, droite et rouge comme une lampe d’icone. La tempête pouvait s’acharner sur la plaine : l’isba était chaude et close. La bûche s’écroula. L’homme rigide fit un