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Page:Le Franc - Grand-Louis l’innocent, 1925.djvu/69

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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

La mère haussa doucement les épaules, et murmura pour qu’Ève seule l’entendît :

— Un requin ! Il n’y a pas de requin par ici… Le pauvre petit ! Il a dû avoir peur de quelque chose… À moins que le goëmon… ou des crampes…

Grand-Louis ramait. La barque heurta le sable. Il fallut prendre le rescapé sous les bras pour l’aider à débarquer.

C’était un garçon au torse vigoureux, au beau visage énergique, sous les grands cheveux ruisselants. Il y avait du sang sur ses jambes.

À cette vue, la mère reprit ses terribles lamentations.

Cependant, Grand-Louis branlait la tête et disait : « Ce n’est rien », en fixant Ève de son regard, et elle comprit qu’il voulait la rassurer.

Alors elle étancha le sang avec des poignées de varech trempées dans la mer, et s’aperçut que les blessures n’étaient que superficielles, disposées en bracelets autour des cuisses. Le sang suintait de petits trous bien rangés, nombreux mais peu profonds, comme produits par les dents d’un jeune chien. Le jeune homme venait d’être attaqué par un squale. Ce printemps-là