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Page:Le Franc - Grand-Louis l’innocent, 1925.djvu/70

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GRAND-LOUIS L’INNOCENT

les pêcheurs qui regagnaient la terre à la tombée de la nuit, le long des chenaux, avaient parfois senti leur barque soulevée d’une manière inexplicable, ou surpris dans les eaux calmes du golfe un remous qu’ils ne comprenaient pas. Arrivés à la maison, ils racontaient aux femmes que des « bêtes du diable » hantaient maintenant ces pa­rages.

Celles-ci, habituées à leurs histoires de revenants, qui se passent toujours entre chien et loup, et ne sachant trop s’ils vou­laient exploiter leur crédulité, restaient scep­tiques. D’ailleurs, les pêcheurs eux-mêmes, une fois à l’abri sous le manteau de la che­minée, étaient moins sûrs de leurs dires.

Cependant, on avait trouvé un squelette de bête marine, long de plusieurs mètres, sur l’îlot du Diance, dans le golfe. La mâchoire en fut portée à la préfecture voisine. C’était un peau-bleu. Des affiches aux portes des mairies signalèrent leur pré­sence et mirent les pêcheurs sur leurs gardes.

Assis sur le bord de la barque, l’adoles­cent, dont les genoux grelottaient encore, essayait de rire à présent de son aventure. Il décrivait comment il s’y était pris pour dépister la bête, nageant en zig-zag, lui assénant des coups de pied quand elle cherchait à l’entraîner. Il se grisait de cette