Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/155

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parmi nous. Et puis, pour attaché qu’il soit à ses croyances religieuses, il est trop cet esclave de la vérité dont je parlais tout à l’heure, il y a trop chez lui du savant désintéressé et sincère pour que le savant ne fasse point tort à l’apôtre. S’il croit à une loi morale supérieure, d’où vient qu’il s’effraie devant les variations de cette loi ? S’il tient que la science est bonne, d’où vient qu’il reconnaisse quelque part qu’elle ne fait qu’élargir notre capacité de souffrir ? Permis, sous la plume d’un Lemaître ou d’un France, ces tristes constatations. Un apôtre ne les ferait point ou, s’il les faisait, recourrait à l’explication habituelle : « C’est un mystère ». Et quel désenchantement dans des maximes comme celle-ci : « L’homme priait pour obtenir des faveurs tangibles de son maître. Maintenant il prie sans se préoccuper de l’effet de sa prière sur le grand Inconnu. ».

L’Inconnu, il a dit le mot. Au fond, personne n’est moins systématique que ce théologien du néo-druidisme. Il a des préférences personnelles et c’est tout. Il sait qu’il vit dans un monde d’apparences ; il sait qu’il ne sait rien, que nous sommes tous logés à la même enseigne et il s’en console en pensant « qu’une certitude absolue sur le lendemain de la mort nous priverait pour ainsi dire de notre liberté ». Et voilà de ces pensées comme il y en a beaucoup chez M. Réveillère et qui me paraissent proprement admirables. Mais je lis un peu plus loin qu’il n’est point sûr que nous soyons des êtres libres, que la thèse déterministe est bien séduisante, et voilà tout remis en question. Pour s’en tirer, il lui faut recourir à l’argument qu’il