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LE THEATRE DU PEUPLE
EN BRETAGNE




À M. A. Delboulle


La Bretagne aura demain son « Théâtre du peuple ». Il se dressera en plein air, sur la place publique du petit bourg de Ploujean, près de Morlaix. La campagne, autour de Ploujean, a je ne sais quelle beauté méditative, comme une beauté de pensée, tant les lignes en sont graves et douces ; il semble qu’elle fonde en elle l’austère pays de Léon et l’aimable Trégorrois. Ploujean même, mitoyen aux deux diocèses, emprunte à l’un et à l’autre. Le leur-ger où se dressera la scène passe justement pour l’un des plus pittoresques de la Bretagne, avec son cimetière latéral, ses grands ormes, son clocher à jour et son encadrement de maisons basses, trapues et grises, aux pierres rejointoyées par des filets de chaux vive qui leur font un quadrillage argenté. L’inauguration du théâtre est fixée au 14 août 1898. Je ne veux point anticiper sur la représentation ; je dirai seulement qu’on y jouera un antique mystère, la Vie de saint Gwénolé, et que les acteurs qui joueront ce mystère sont des artisans et des laboureurs de la localité, petites gens donc, sans grande éducation, sans talent même, au sens où nous le prenons des acteurs ordinaires, mais de foi vive et tout soulevés par endroits de je ne sais quelle fureur barbare et sacrée. Le chef de la troupe,