Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/281

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qualité qui nous ont prêté leur assistance, dit le prologue de Louis Eunis, et je leur souhaite l’accomplissement de tous leurs désirs en ce monde et le Paradis en l’autre ». — « Je ne saurais remercier trop les gens du canton de nous avoir secondés, dit un autre prologue tiré du Mystère de Moïse, chacun suivant ses moyens, en nous prêtant des charrettes, des planches, des soliveaux et des barriques pour construire notre théâtre. » Le clergé seul, sauf en quelques paroisses où il était revenu sur son interdit, ne désarmait pas. Dans l’épilogue de la Vie de monsieur saint Jean-Baptiste, l’acteur s’écrie tristement : « Tout ici-bas trouve sa fin, tout, excepté la grâce de Dieu : notre tragédie aussi touche enfin à son terme. — En l’année 1763, nous avons donné une représentation de la Vie de saint Jean-Baptiste, copiée sur le cahier écrit à Pluzunet par un jeune homme du pays. — Nous eussions bien désiré continuer d’en donner des représentations, mais, hélas ! un ordre de monseigneur l’évêque de Saint-Brieuc défend les représentations de tragédies bretonnes dans toute l’étendue de son évéché. — Il y est même dit que représenter des vies de saints est un cas réservé : et, cependant, interrogez l’histoire, feuilletez les livres les plus anciens du pays, vous n’y trouverez nulle part que ce soit même un péché véniel que de réciter les vies des saints ».

La conviction de ces pauvres komedianchers était fort grande, en effet, la plupart du temps. Si l’Église ne les avait pas laissés à eux-mêmes, nul doute qu’ils n’eussent jamais manqué aux bonnes mœurs et à la bien-