Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/299

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à Lesneven. Il l’eut ou plutôt il faillit l’avoir, car elle était à peine sur son piédestal qu’il fallut l’en descendre et Dieu sait maintenant quand elle y remontera. C’était pourtant un morceau de premier ordre et qui faisait grand honneur au statuaire, M. Cyprien Godebski. Justement fier de son œuvre, M. Godebski l’avait fait couler à la cire perdue chez un des rares fondeurs toscans qui ont gardé le secret de la patine donatellienne : le bronze prit là ces tons nuancés et souples qui sont une caresse pour les yeux.

Encore faut-il quelque éducation artistique pour se complaire à ces jeux du métal. M. Quirin le fit bien voir. La statue venait d’arriver et on la sortait religieusement de sa caisse. Elle ne reluisait pas. Ce bronze tout neuf s’obstinait à ne pas présenter le poli d’une bassinoire. Bien plus, on y distinguait par places une sorte de tégument verdâtre qui témoignait ouvertement du mauvais état de son récurage.

M. Quirin est un homme autoritaire. Soyons franc : c’est lui qui a mené à bonne fin, contre vents et marées, cette affaire de la statue. Le comité, qu’on lui a platoniquement adjoint, ne l’a guère aidé jusqu’ici dans sa tâche. Bref il ne manque à M. Quirin, pour être un administrateur excellent, que d’avoir fait quelques visites à notre Galerie des Antiques. Il y eut renforcé sa conception particulière de l’art. Celle-ci est restée un peu élémentaire. M. Quirin n’imaginait point une statue qui fût neuve et qui ne brillât point sur toutes les coutures. Il pensa que le mauvais emballage de la statue avait causé tout le mal. Sur quoi deux ouvriers furent commandés qui reçurent