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Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/56

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patenté, reconnu, disposant des honneurs et des prébendes, elles constituent un deuxième pouvoir mal défini, anonyme, occulte, moins révéré en apparence, mais plus puissant peut-être que l’autre.


V


Pour étranges déjà que soient ces pardons de chrétiens, il y a plus étrange encore : les pardons d’animaux. Saint Éloi, saint Hervé, saint Gildas sont commis, dans la liturgie bretonne, aux bêtes de trait. À Saint-Hervé-de-Gourin, tous les pèlerins mâles doivent faire trois fois à cheval et en prière le tour du saint édifice, mettre pied à terre, couper la queue de leur monture et la porter sur l’autel du bienheureux. À Saint-Gildas du Port-Blanc, où l’on n’accède qu’à mer basse, les pèlerins, droits en selle, n’attendent pas que l’eau se soit toute retirée et se lancent à fond de train vers la chapelle pour faire manger plus vite à leurs montures un morceau de pain bénit dont ils ont préalablement frotté le pied du saint.

Mais saint Gildas et saint Hervé n’exercent leur patronage que sur une aire de pays très limitée. Le grand patron des chevaux, c’est saint Éloi, que les Bretons appellent sant Allar. L’ancien ministre du bon roi Dagobert est fort révéré en Bretagne, où son souverain l’expédia comme négociateur près de Judicaël. L’entrevue aurait eu lieu aux environs de