Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/57

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Quimper, en un endroit nommé Stang-Ala, et dont la fontaine a gardé, paraît-il, la singulière propriété de changer son eau en vin une heure par an. Le tout est, comme dit le proverbe, de tomber sur cette heure, kouéza war ann heur. Stang-Ala, du reste, n’a pas le monopole de la dévotion à saint Éloi. On honore également ce grand saint dans le Léon, le Tréguier et le Goélo. La preuve en est qu’il n’y compte pas moins d’une vingtaine de chapelles et d’oratoires qui sont parmi les plus fréquentés de la région. Aussi, quand arrive son pardon, les routes s’encombrent-elles de juments, d’étalons et de poulains accoués par rang d’âge ou de taille ou de sexe et que les pèlerins conduisent par la bride tout en récitant leur chapelet. En quelques endroits pourtant, comme à Saint-Éloi-de-Kerfourn, le cérémonial comporte un défilé monté : les fermiers enfourchent leurs bêtes et, précédés du drapeau paroissial, d’un tambour et d’un biniou, se rendent en cavalcade à la fontaine du saint, facilement reconnaissable aux fers à cheval sculptés sur sa frise. Ils mettent alors pied à terre, déposent un écu par bête dans le plateau que tendent les trésoriers de la fabrique, puisent de l’eau bénite dans la fontaine et en frottent énergiquement leurs montures. À Saint-Éloi-de-Guiscriff, au lieu des ex-voto ordinaires, plaques commémoratives, tableautins, etc., la chapelle et la fontaine sont toutes festonnées de petits chevaux de buis, naïfs hommages des dévots serviteurs du saint et qu’ils ont taillés au couteau pendant les veillées d’hiver. Éloi lui-même n’est plus ici le saint bénisseur et mitre qu’on rencontre dans les trois quarts