Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 1, 1902.djvu/87

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nœuvre de ces marins du Léon dont parle Alexandre Bouet et qu’on voit, en exécution d’un vœu fait à la mer, grimper le jour du pardon à la pointe du clocher de leur paroisse et s’y suspendre la tête en bas et les bras le long du corps, le temps de réciter dévotement un pater et un ave. L’importance du vœu se mesure à l’importance du service. Tout vœu est un contrat qui emporte obligation réciproque entre les parties. Synallagmatisme gros de conséquences, là surtout, comme chez les Bretons, où le do ut des est la loi qui régit les rapports entre fidèles et bienheureux. Qu’il soupçonne sa partie céleste d’avoir volontairement manqué au pacte, le fidèle se fâche, montre les dents, fait les cent coups. À l’île de Sein, jusqu’en ces dernières années, l’intervention du bienheureux Corentin passait pour procurer aux pêcheurs des relèves abondantes. Mais il arrivait qu’après l’avoir bien aumôné et prié les pêcheurs revenaient à la maison les mains vides. Colère des pauvres gens qui enfonçaient la porte de la chapelle pour « objurguer » la statue du saint. « Quelques irrévérencieux, dit M. Boulain, allaient même jusqu’à lui lancer leurs chiques à la figure et saint Corentin, qu’on ne débarbouillait pas, prenait à la longue une teinte d’un hâle très prononcé. » Le clergé dut fermer la chapelle pour couper court à ces extraordinaires pratiques. Corentin était le seul qui ne s’en fâchât point. Peut-être se rendait-il obscurément compte qu’il était dans son tort, qu’il n’avait pas suffisamment défendu les intérêts de sa clientèle et qu’il en devait porter la peine. Il y a des saints si distraits, d’autres