Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/152

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pas été barde jusqu’au bout s’il n’avait, comme tous les bardes, mangé son bien avec son revenu.

— Et pourtant, me disait Françoise Le Quer, il gagnait gros comme lui. Quand il revenait de tournée avec sa femme, Marc’harit avait des pièces d’argent cousues tout autour d’elle, dans la ceinture de sa jupe !

Ces pièces-là n’ont pas toutes roulé à la rivière et quelques-unes ont dû prendre le chemin des auberges voisines. Mais n’anticipons pas, s’il vous plaît, et revenons à l’œuvre du barde. M. Tallibart m’a parlé d’un autre poème que Yann aurait composé a l’occasion d’un incident héroï-comique dont Tréguier fut le théâtre, vers 1840, pendant les fêtes municipales.

— Au programme des réjouissances, me dit M. Tallibart, se trouvait une course à la nage dont une truie était l’enjeu. Il s’agissait d’attraper la truie par la queue et de la ramener sur la berge. Mais la queue avait été fortement suiffée et la truie se défendait mordicus, aucun des concurrents ne parvint à l’attraper. La truie fut placée « sous séquestre ». D’où un concert de réclamations, puis une véritable émeute. Yann-ar-Gwenn, qui assistait à la scène, sentit sa verve s’éveiller et composa sur ce thème une chanson qui eut un succès fou…

Je n’ai pu, malheureusement, me procurer ce chef-d’œuvre. Il a eu le sort commun à la plupart des productions du barde, imprimées sur feuilles volantes, et qui s’en sont allées où vont toutes les feuilles. Aucune bibliothèque publique n’a pris soin de recueillir cette littérature éphémère de nos rhapsodes nationaux…